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Le cimetière des fleurs

Khadija Elhamrani

Le cimetière des fleurs

Ce matin, le petit Farid s’est éteint. Mort à jamais, mort pétrifié, adossé au mur, dans un coin sombre de nuit comme de jour dans l’asile censé le protéger.
Farid n’est plus ! Farid est mort et enterré, sans pleurs ni fleurs, lui qui a beaucoup pleuré et que jamais le bonheur n’a effleuré.
Farid s’est éteint à la fleur de l’âge, une fleur fanée plus tôt que prévu. Une fleur sevrée tôt de toute sève de clémence et de paternité. Une fleur vouée dès sa naissance à la tragédie.
Né avant terme un soir noir, le même jour du décès de son jeune père dans un atroce accident de la circulation, et d’une mère victime précoce d’un mariage forcé, Farid a connu les enfers d’un beau père oisif, violent et addict. Et comme s’il ne lui suffisait pas d’être orphelin de son père et de son enfance, Farid, cet unique bourgeon brisé à 8 ans, intelligent mais malchanceux, voyait sa mère mourir chaque soir sous les coups fatals de sa brute de beau-père. Et il jurait par tous les saints dont il avait entendu sa mère parler un jour, et par le seul Dieu dont il n’a jamais ressenti la présence hormis dans les appels des muezzins à la prière de l’aube qui réveillaient la bête féroce et réveillaient ses sévices:
_ Je dois grandir le plus vite possible, et on verra, je dois le tuer !
Un jour en consolant sa mère meurtrie, celle-ci l’entendit encore jurer :
_ Tu verras, c’est lui ou moi !
Mais Farid n’avait pas le sang criminel, il aimait la vie, et il aimait plus que tout aller à l’école, au moins là-bas, la brute féroce ne pouvait pas l’atteindre, n’avait pas d’autorité sur lui, mais le soir… Mon Dieu comme il craignait les soirs !
Un matin en titubant, il arriva en classe en pleurs et en sang.
_ Que t’est-il arrivé fiston ? s’écria la maîtresse de Français Zeina qui l’aimait beaucoup, en le tirant de la foule d’enfants qui s’était formée autour de son petit corps meurtri.
_ Qui t’a fait ça, mon fils ? Dis-nous ? Un de tes camarades ? lui demanda le directeur alerté par la maîtresse.
Le corps frêle du petit Farid était fortement secoué par des sanglots intérieurs, plus forts que tous les flots de larmes que pouvait verser un humain. Une seule phrase sortait de sa bouche, régulière, monotone, entrecoupée par des sursauts de hoquets :
_ Sauvez-la, sauvez ma mère, c’est elle qu’il faut sauver, sauvez-la, sauvez-la… !
Monsieur Mehdi, le directeur, réunit de toute urgence ses hommes et femmes de confiance parmi les instituteurs de son école, ceux qu’il connaissait cléments, humains et engagés dans le soutien social et moral de leurs élèves. On appela illico les autorités et on fit le nécessaire. La maman fut fort heureusement arrachée aux griffes de la bête au dernier moment. L’ayant surpris en flagrant délit d’abuser de sa pupille, elle se jeta sur lui sans forces et faillit mourir étranglée par ses grosses mains bestiales qui ne savaient pas travailler ni gagner de quoi faire vivre dignement une si petite famille, mais savaient bien frapper et tuer. Le procureur général ayant une ample connaissance des antécédents criminels du beau-père, le procès fut tranchant et la brute mise derrière les verrous.
On souffla longuement de soulagement et une autre fenêtre de la vie s’ouvrit devant Farid. Etait-ce cette fois une fenêtre sur la paix, la lumière, le bonheur ?
Saïda n’avait de la femme heureuse que le nom, mariée de force avant l’âge, déjà maman avant l’âge et vouée au veuvage avant l’âge, sans connaissances ni diplômes ni ressources ni famille, elle dût demander assistance à la famille de son mari incarcéré. La mère de celui-ci, une mégère aux allures des anciens caïds traîtres sous les colons, accepta sa demande d’asile mais à une seule condition :
_ Toi, tu peux bien servir la maison et la famille de celui que tu as osé envoyer en prison, tu seras notre bonne toute ta vie, et voire si ça te fera pardonner ton crime ! Mais personne ne veut voir ton bâtard de garnement, lui non, c’est bien lui la cause de tous les malheurs ! C’est à prendre ou à laisser.
Le père, les frères, tous des rustres aux regards sauvages, voraces et impitoyables acquiesçaient de la tête. Ils avaient perdu un fils, parti en prison certes, mais ils récupèraient une belle marchandise bon marché et sans défense.
On aurait pu tendre l’oreille et entendre le mortier du cœur de Saïda broyer sa peine et ses remords et crier de toutes les forces qui lui restaient :
_ Nooon, jamais sans mon fils ! Jamais sans mon petit Farid ! Il n’a rien fait, lui ! Ne me le prenez pas !
Mais on lisait dans ses yeux éteints et à sa tête baissée jusqu’à terre :
_ Que peut faire un mort face au croque-mort ? Faites de moi ce qui bon vous semblera, mais laissez vivre ma petite luciole unique ! Il a assez souffert à cause de moi. Je n’ai que lui dans ce monde !
Le lendemain, Farid fut placé dans un asile pour enfants grâce aux recommandations du directeur de son école, monsieur Mehdi

, monsieur Mehdi, tout en poursuivant ses études où il se débrouillait tant bien que mal. Néanmoins, le petit Farid avait toujours, chaque matin, les larmes aux yeux, des yeux rouges et éteints qu’il détournait à chaque question de madame Zeina, qui finit de mettre cette tristesse sur le compte du manque et de la solitude.
Ce matin, madame Zeina est plus qu’affligée, plus qu’atterrée, elle s’arrache les cheveux et bat ses cuisses de ses deux mains. La tragédie s’est accomplie ; Farid son petit préféré, son protégé n’est plus.
_ Mort ? Et pétrifié ? Mais comment est-ce possible dans un asile censé protéger les enfants sans défense ? Est-ce vraiment un pays de droits où nous vivons ?
Ce matin, gris est le ciel de l’école, éteints sont les regards des enfants cherchant vainement la petite luciole, et noirs sont les cœurs d’affliction et de douleur.
_ Fariiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiid ! Des oiseaux effrayés par le cri strident déchirant le voile gris du silence religieux de la cour de cette école le répandent en écho, et Zeina tombe inconsciente.
Des institutrices en larmes s’efforcent de la calmer mais en vain, un peu plus loin, une petite foule s’est formée, une cellule de crise dit-on. Au milieu, monsieur Mehdi presque effondré raconte une scène plus atroce que la précédente.
_ Il ne pouvait rien contre ce maître qui le violentait chaque soir, il était si petit, si fragile et si désarmé contre celui censé le défendre et le protéger. Chaque soir, c’était le calvaire. Hier Farid a préféré se réfugier dans le coin le plus sombre de l’asile, sous les lames aiguisées de la nuit et les griffes acérées de la peur du noir. Et c’est là que le chien du gardien l’a déniché. Allons le mettre sous terre.
Ce matin, Farid est mort, comment ose-t-on enterrer une fleur à peine éclose ?, monsieur Mehdi, tout en poursuivant ses études où il se débrouillait tant bien que mal. Néanmoins, le petit Farid avait toujours, chaque matin, les larmes aux yeux, des yeux rouges et éteints qu’il détournait à chaque question de madame Zeina, qui finit de mettre cette tristesse sur le compte du manque et de la solitude.
Ce matin, madame Zeina est plus qu’affligée, plus qu’atterrée, elle s’arrache les cheveux et bat ses cuisses de ses deux mains. La tragédie s’est accomplie ; Farid son petit préféré, son protégé n’est plus.
_ Mort ? Et pétrifié ? Mais comment est-ce possible dans un asile censé protéger les enfants sans défense ? Est-ce vraiment un pays de droits où nous vivons ?
Ce matin, gris est le ciel de l’école, éteints sont les regards des enfants cherchant vainement la petite luciole, et noirs sont les cœurs d’affliction et de douleur.
_ Fariiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiid ! Des oiseaux effrayés par le cri strident déchirant le voile gris du silence religieux de la cour de cette école le répandent en écho, et Zeina tombe inconsciente.
Des institutrices en larmes s’efforcent de la calmer mais en vain, un peu plus loin, une petite foule s’est formée, une cellule de crise dit-on. Au milieu, monsieur Mehdi presque effondré raconte une scène plus atroce que la précédente.
_ Il ne pouvait rien contre ce maître qui le violentait chaque soir, il était si petit, si fragile et si désarmé contre celui censé le défendre et le protéger. Chaque soir, c’était le calvaire. Hier Farid a préféré se réfugier dans le coin le plus sombre de l’asile, sous les lames aiguisées de la nuit et les griffes acérées de la peur du noir. Et c’est là que le chien du gardien l’a déniché. Allons le mettre sous terre.
Ce matin, Farid est mort, comment ose-t-on enterrer une fleur à peine éclose ?

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